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Un Père Noël pas comme les autres

Noël est passé et j’espère que le Père Noël a été généreux avec tout le monde ! Difficile de rester sage ? Vous lui avez déplut d’une manière ou d’une autre ? Et bien ne vous inquiétez pas ! Parce qu’au cas où le Père Noël typique, rouge et blanc avec ses rennes, vous a abandonné, il existe plus d’un distributeur de cadeaux dans le folklore ! Et quand je dis plus d’un, je ne peux même pas fixer un nombre précis. C’est pourquoi je vous propose pour aujourd’hui une alternative au gros bonhomme rouge et blanc. Aujourd’hui nous allons nous attaquer au Père Noël russe, la version bleue (la plupart du temps), celle qui est fêté le 1 janvier sur le territoire de la Rus, j’ai nommé Дед Мороз! (Ded Moroz, oui j’ai un clavier qui me permet d’écrire en russe, autant l’utiliser). Vu la date de la célébration, les moins sages ont encore un peu de temps pour se rattraper. On connait tous le Père Noël rouge et blanc à la longue barbe, aux yeux rieurs et au « Ho,Ho,Ho » retentissant. C’est en quelque sorte le symbole universel des fêtes de Noël. Le légendaire de ce personnage est plus que connu (traîneaux, rennes, cadeaux, elfes…), aussi je ne m’y attarderai pas, bien que retracer les origines de ce personnage et la fameuse polémique Coca-cola mériteraient un article à lui tout seul. C’est le Père Noël russe qui nous intéresse ici. Et ce gars-là, il est ancien, très ancien même. Si ancien, que c’était un dieu avant d’être un bonhomme placardé sur les cartes postales de fêtes. Alors on va arrêter de le qualifier de père Noël russe et l’appeler par son nom, Ded Moroz. Ce nom est composé de « Дед », diminutif de « дедушка », grand-père, et «мороз», le gel. C’est donc du Grand-père du Gel ou encore du Grand-père l’Hiver dont il s’agit. Dans cet article, nous allons retracer l’histoire de ce personnage à partir de ses différents aspects.

Мороз/Moroz, le dieu païen La mythologie slave est riche d’énormément de divinités intéressantes (qui peut oublier Pereroug, le dieu des disputes dont les prêtres se chamaillaient tout le temps ?). Le territoire slave étant propice au froid, il est normal qu’un dieu y soit dédié ainsi qu’au gel et à l’hiver. Autant dire que l’on est loin du gentil personnage de Noël, mais plus proche du dieu destructeur que l’on doit supplier pour garder ses récoltes. Les pouvoirs de Moroz consistaient tout simplement à installer le gel et la neige sur les arbres et les champs, à créer des blizzards et à geler les rivières. Le rituel visant à s’en protéger consistait à ce que le membre de famille le plus âgé se tienne sur le seuil en proposant à Moroz du kissel (sorte de compote) ou de koutia (sorte de gruau de céréale) en lui demandant d’épargner tel et tel plante ou céréale. Déjà, on le sait vêtu d’un gros manteau et d’une chapka de fourrure, chose qui reste vrai dans toutes les versions du personnage. Evidemment, tout cela est à prendre avec des pincettes car les croyances slaves n’ont laissé derrière elles que d’infimes traces qui ne permettent que des hypothèses. Mais Moroz est resté dans les mémoires si bien qu’il a survécut dans les contes si chers aux russes.

Морозко/Morozko, le personnage des contes


Ilustration de Bilibine

C’est ainsi que l’on se retrouve avec Morozko, deuxième version de notre personnage. Morozko est lié à certains contes et ne change pas drastiquement selon les versions. Ici, le personnage est ambigu, à la fois juste et sévère. On se rapproche un peu plus de notre papa noël. Pour illustrer, asseyez-vous, il est temps de vous raconter l’histoire de Morozko et ce, dans les grandes lignes. Un couple de vieux à trois filles, et évidement la vieille n’aime pas sa belle-fille, issu d’un premier mariage du vieux (typique des contes, à quand une belle-mère aimante ?). Du coup elle décide de l’envoyer marier Morozko (le gel) en espérant que ça la tue. Abandonnée dans les bois, elle survit jusqu’à ce que Morozko arrive, la trouve complètement frigorifiée et lui demande à plusieurs reprises si elle a froid. Elle trop polie répond que non, ça va, -30° c’est limite l’été pour elle, et du coup Morozko s’attendrit et lui fait cadeau de fourrures, d’un traineau et de nombreux cadeaux. Bien entendu, la vieille envoie ses filles qui elles se plaignent du froid devant Morozko qui les laisse mourir de froid. Ce conte a plusieurs variantes, dont une où les gamines doivent vivre avec Morozko et faire ses taches ménagères sans se plaindre du froid avec les mêmes résultats. On retient bien que la morale, c’est un peu « arrête de te plaindre et fait ce qu’on te dit et tout ira bien » mais bon dans un pays où l’hiver reste un peu trop longtemps, on peu imaginer que se plaindre constamment du froid peut-être un peu lourd à entendre au bout d’un moment. Donc ici, avec Morozko, on retrouve déjà un prototype du Ded Moroz, avec sa distribution de cadeaux pour les justes et polis.

Дед Мороз/Ded Moroz, le père noël Enfin nous arrivons au Ded Moroz en lui-même. Vêtue de son lourd manteau bleu et de la toque de fourrure qui l’est tout autant, il arpente la Russie la nuit de notre nouvel an (on a 6 jours de décalage avec le calendrier orthodoxe) pour distribuer des cadeaux aux enfants sages. Il est très populaire en Russie, des défilés de Ded Moroz prenant place à Moscou mais après les traditions qui y sont liées sont très proches de celles du Père Noël que nous connaissons. Néanmoins il a quelques spécificités en dehors de ses vêtements et de son sceptre qui lui sont propres.


Snegourotchka de Viktor Vasnetsov

Sa famille


Ded Moroz est souvent accompagné lors de sa distribution de cadeaux de sa fille, ou petite-fille selon les cas, Snegourotchka. Là aussi les versions sont nombreuses quant à l’origine de la petite. Certaines versions en font la fille de Ded Moroz et de Vesna, la personnification du printemps. Snegourotchka a eut droit à des films, des dessins animées, des ballées et opéras. Son histoire tragique fait qu’elle meure après avoir ressenti le sentiment de l’amour qui a réchauffé son petit cœur et, étant faite de neige, elle n’a pas survécu longtemps à la chaleur. Néanmoins, elle est encore là tous les ans avec son père, elle va donc mieux (à moins qu’il puisse en créer autant qu’il veut, la neige c’est facile à trouver en Russie).



La ville du Grand père du Gel

Ded Moroz vous accueille dans son manoir

A l’instar du Père Noël qui vit soit au Pôle Nord, soit en Laponie, Ded Moroz a une ville bien à lui, mais c’est assez récemment qu’il a dû aménager à Velikij Oustioug, en 1998. La ville étant considérée comme celle frappée par les premières gelées sévères de l’année, il était normal que ce soit la ville du Grand-père du Gel. Il y possède sa maison officielle, son anniversaire (le 18 novembre si vous voulez faire les lèches-bottes). Cette ville a vu le nombre de touriste exploser, passant de 1999 à 2002 de 2000 à 32000 touristes, autant dire que Ded Moroz est populaire et peut rapporter gros ! Ded Moroz existait déjà au 19ème siècle et c’est à partir de ce moment là que son personnage s’est développé avec sa fille et ses caractéristiques. Evidement la Révolution n’apprécie pas ce genre de traditions, dénonçant Ded Moroz comme un allié de la religion et du prêtre. Cependant, il va se détacher de cet aspect religieux pour continuer à être le symbole principal de cette période de fête. Bonnes fêtes de la part de l’Amphisbène !


Ded Moroz veille à ce que les enfants soit sages, et Poutine veille à ce que Ded Moroz le soit aussi!

Bibliographie : Collectif, Славянские мифы, Moscou, 2016. Collectif, Мифы и легенды древних славян, Moscou, 2014. Gruel-Apert L., Le monde mythologique russe, Paris, 2014.

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