Nuit de Walpurlgis, Walpurgisnacht, Hexenacht, nuit des sorcières... En voilà des noms qui intriguent et transpirent l’occultisme.
Si aujourd’hui le 1er mai et simplement un jour férié et la fête du travail (en France en tout cas), la nuit du 30 au 1er mai est très spéciale dans bien des pays, et ce depuis des temps tout à fait reculés.
Cette nuit, on l’appelle la nuit de Walpurgis, et ça vous dit peut être vaguement quelque chose parce qu’elle inspiré de très grands auteurs et artistes : on en parle dans Faust de Goethe, dans « l’invité de Dracula » (une nouvelle annexe à Dracula) de Bram Stoker, Lovecraft en parle lui aussi dans deux de ses nouvelles (la maison de la sorcière et l’abomination de Dunwich). La poésie n’est pas en reste car Verlaine décrit cette nuit dans un de ses poèmes, et la musique s’en est également saisie dans plusieurs opéras, Fantasia de Walt Disney et toute une batterie de chansons de black métal.
Encore fêtée dans plusieurs pays, où on se grime en sorcière, allume de grands feux et danse dans la nuit avec (ou pour se protéger) des esprits et créatures maléfiques, cette nuit a traversé les âges, et l’Amphisbène n’a donc pas pu résister à vous en parler pour que vous aussi, vous puissiez célébrer dignement.
Les origines : Beltaine et le retour du printemps
Remontons un petit peu le temps pour comprendre d’où nous vient la survivance de ces nuits de Walpurgis. J’en parle et j’en parlerai encore souvent, mais beaucoup d’anciennes religions basent leurs fêtes sur les équinoxes et également sur le passage des saisons, et c’est là qu’intervient la culture celte.
Chez les celtes, cette célébration s’appelle Beltaine, et est l’une des quatre grandes fêtes celtiques attestées. Elle est le pendant de Samhain, qui marque, elle (le 31 octobre), la fin des jours ensoleillés. Beltaine, c’est le moment du réveil de la nature, des divinités païennes du printemps et de la fécondité, qui viennent mettre fin à l’hiver. On la célébrait le 1er mai, surtout en l’honneur du dieu Bel / Belenos / Belos. A cette occasion, les druides allumaient des feux purificateurs qui protégeaient le peuple des bêtes sauvages et de la maladie.
Le printemps est là, et c’est le début des activités diurnes (qu’on va venir accomplir de jour), où on va planter, semer, et ces taches se déroulent sous l’œil attentif d’un collège druidique. Drôle de coïncidence avec notre fête du travail ! D’ailleurs, le muguet serait une survivance des rameaux printaniers symbolisant le retour de la floraison.
On retrouve donc ce type de célébration un peu partout dans les pays nordiques et d’Europe de l’Est, où les saisons sont plus marquées. Mais vous vous doutez bien qu’avec l’arrivée de l’Eglise Catholique, rien ne peut jamais bien se passer dans le meilleur des mondes, et qu’on ne va pas tolérer de telles barbaries, QUE NENNI.
La diabolisation du paganisme
C’est alors qu’en royaume de Sussex (en Angleterre) né une bien brave missionnaire du nom de Walburge, vers 710. Elle s’investi de la mission divine d’évangéliser les Germains de l’île, parce qu’apparemment c’est comme ça qu’on s’amuse au VIIIe siècle. Comme ça fonctionne plutôt bien, elle décide de se rendre en Germanie, et devient alors abbesse d’un couvent, où elle peut poursuivre sa mission. Elle sera canonisée un 1er mai, et ça tombe bien pour les catholiques.
L’Eglise voulant donc s’approprier la fête, elle lui donna le nom de Sainte Walburge, et la célébration devint alors “Walpurgis”. Vous le savez, l’Eglise aime diaboliser les traditions païennes. C’est probablement l’une des nombreuses raisons pour laquelle on a attribué par la suite ces rassemblements autour de grands feux, se réjouissant du retour de la lumière, à des sabbats de sorcières invoquant les démons, discréditant ainsi la célébration.
Ces petites sauteries perdureront alors clandestinement dans toute l’Europe, et ce jusqu’à nos jours, malgré les protestations de l’Eglise.
La légende de la nuit des sorcières
Du coup, nos païens deviennent des sorcières communiant avec des démons, et c’est donc en particulier en Allemagne que cette légende se développe, car les sorcières se réunissaient apparemment sur un mont proche d’Heidenheim (où Walburge était abbesse), afin de réaliser leur sabbat.
Aujourd’hui, les gens font perdurer cette tradition notamment en se déguisant, se jouant des tours, et basiquement en faisant le plus de bruit possible pour effrayer le diable. On peut également suspendre des rameaux devant sa maison pour éloigner les mauvais esprits, ou laisser des tartines de miel en offrande à “des chiens fantômes ou chiens-loups” (pas sur que ça fonctionne avec les chiens de Resident Evil).
On se retrouve donc tous déguisés en haut des montagnes, pour allumer de grand feux et danser autour. Aujourd’hui, la fête est devenue très touristique, et dans la plupart des villes où on peut encore y assister ce sont des troupes professionnelles qui viennent animer ces spectacles, rendant la cérémonie payante dans certains lieux, et du coup un peu moins authentique.
En France cette fête est également encore fêtée sous le nom de Nuit des Sorcières (Hexenacht), en particulier en Moselle-Est et en Basse-Alsace. La nuit du 30 au 1er, lors des XIX et XXe siècles, on sortait et s’amusait à déplacer tout un tas d’objets pour faire des farces à ceux qui auraient trop peur de s’aventurer dehors et se cloitreraient chez eux pour ne pas croiser d’esprits ou de créatures maléfiques. Aujourd’hui ce sont les enfants qui font des farces à tout le monde, et cette fête s’est transformée en sorte d’Halloween moderne sous l’influence de la culture américaine.
Les célébrations aujourd’hui partout dans le monde :
En République tchèque, les enfants se déguisent en sorcières et on fait également des feux autour desquels on célèbre le retour du printemps.
En Roumanie, les esprits maléfiques sont de sorties de ce soir là, et viennent dans notre monde pour se livrer à des bacchanales. Gare à celui qui les surprendrait ! On préfère rester bien au chaud que de prendre ce risque. C’est un peu la même chose à Samhain chez les celtes, où le voile entre les mondes est très fin et la communication avec les esprits plus facile.
Les Finlandais, eux célèbrent Vappu : les gens sortent dans la rue pour faire la fête, et boivent à cette occasion une boisson fermentée à base de miel, appelée sima. On retrouve le même genre de célébration en Suède.
Enfin en Irlande, on commémore en ce jour le débarquement des premiers habitants, le peuple de Partholon. C’est également un premier mai que les Tuatha De Danann abordent l’île, et brûlent leurs bateaux afin de ne pas pouvoir repartir.
Si vous avez déjà vu, participé, entendu parler d’une de ces célébrations, venez partager l’expérience avec nous ! Si vous voulez aussi tout simplement nous partager un morceau de texte ou une musique en rapport, vos contributions sont bienvenues !
Joyeux sabbat !
Sources
Jean Paul Persigout, Dictionnaire de Mythologie Celtique, Imago, Paris 2009
Jean Markale, le Druidisme
Christian-Joseph Guyonvarc'h et Françoise Le Roux, La Civilisation Celtique
https://www.universalis.fr/encyclopedie/nuit-de-walpurgis-nuit-des-sorcieres/
https://www.guidefest.com/festivals/walpurgisnacht-nuit-de-walpurgis
http://www.lasemaine.fr/2014/05/15/les-sorcieres-existent-toujours
Et les témoignages de copains Allemands et Finlandais !
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